Depuis plusieurs mois maintenant, Puma rayonne dans le paysage footballistique. Outre les nombreux joueurs qui rejoignent les rangs de la marque allemande, les produits sont également au coeur de cette évolution de l’image de Puma dans le football. Si la Future avait déjà donné de bons résultats et des performances à la hauteur de ce que l’on peut attendre de la troisième marque de notre sport favori, la sortie de la Ultra au mois d’aout dernier a donné encore plus de crédit à une marque qui est désormais incarnée par Antoine Griezmann et Neymar. Quelques heures après la sortie de la nouvelle Ultra 1.2 et son coloris Speed Of Light, nous avons eu l’occasion de nous entretenir avec Dominique Gathier, Head of Product Line Management Footwear Teamsport.
Un entretien passionnant avec un des hommes de l’ombre de Puma et pourtant au coeur même de ce qui est un rouage essentiel de la bonne forme de la marque : le produit. Oui des joueurs nouveaux s’engagent avec Puma ces derniers mois et ces arrivées sont le fruit d’une stratégie marketing et de sponsoring globale. Mais sans avoir les produits adaptés et d’un niveau équivalent ou supérieur aux concurrents, il serait impossible de mettre cette stratégie en place. Développer de nouveaux modèles, innover, prévoir l’avenir et toujours avoir un coup d’avance, voilà le métier-passion de Dominique Gathier qui nous parle en détail de la Ultra.
Commençons par le commencement, quel était le brief de départ au moment de lancer la création de la Puma Ultra ?
Quand on a commencé à travailler sur la Ultra, notre objectif était de créer une chaussure pour les footballeurs qui basent leur jeu sur la vitesse. On voulait donner un outil de travail complémentaire à leur jeu, l’objectif numéro un était de recréer cette chaussure pour coïncider avec la vitesse de déplacement. On avait une certaine histoire avec la evoSPEED mais aussi avec la V1-06 qui était une des premières chaussures de vitesse du marché. On avait cette histoire et ça colle également avec l’image de notre marque et de notre ambition d’être la marque la plus rapide. C’était donc naturel pour nous de repartir sur cette base.
« Ce qu’on voulait arriver à faire, ce n’était pas une chaussure légère à tout prix, mais plutôt une chaussure légère qui reste une chaussure de foot »
Quand on a ce brief et que l’on est devant une feuille blanche, par quoi on commence ? Où puisez-vous votre inspiration ?
C’est un processus hyper passionnant, rien que d’en parler de nouveau ça me donnerait de nouveau des frissons tellement c’est excitant. C’est l’essence de notre travail. En premier lieu, on se rapproche du terrain. On part d’analyse, d’observations que l’on fait du jeu que ce soit au niveau pro mais également en amateur. Voir les joueurs, analyser comment ils se déplacent, quelles sont les notions que l’on peut améliorer. De là, on met en place des cahiers de charge qui vont être le fil conducteur de la conception de la paire. Ensuite, le deuxième aspect est technologique. Quelles sont les innovations ? Quelles sont les nouveautés que l’on peut créer sur le marché ? C’est quelque chose de forcément important. Pour finir et pour parler de l’inspiration, on regarde aussi et surtout en dehors du foot. C’est quelque chose qui est intéressant, il faut sans cesse être curieux dans notre travail. Il faut trouver des inspirations dans d’autres sports, d’autres industries. Sur la Ultra et grâce à notre puissance dans le sport automobile, il y a toujours des raccourcis qui se mettent en place et qui donnent des idées dans le but de retranscrire certaines bonnes pratiques dans le milieu du foot.
La technologie MatryxEVO est la grosse innovation liée à la sortie de la Ultra. Pouvez-vous nous en dire plus à son sujet ?
C’est effectivement un élément innovant de la Ultra. Il nous a permis d’arriver au résultat final que l’on connait : une chaussure hyper légère mais qui apporte également tous les composants dont on a besoin pour le sport de haut niveau en terme de maintien et de stabilité de la chaussure. Le MatryxEVO c’est exactement cela. C’est une matière inédite et que l’on a développé. On l’a vraiment imaginé comme on la voulait et qui permet d’intégrer des filaments techniques aux endroits que l’on souhaite. Concrètement, on parle de filaments carbone et en fibres d’aramide, que l’on a placé stratégiquement pour avoir le maintien et la stabilité du pied dans la chaussure qui garantissent les déplacements rapides. Le fait de pouvoir la concevoir comme on voulait et d’intégrer ces filaments nous permet en conséquence de réduire certains autres éléments comme des éléments de maintien que l’on ne voit pas forcément de l’extérieur mais qui sont dans la construction interne de la chaussure. On était alors en mesure de réduire le niveau de ces éléments de maintien dans le but de réduire le poids de la chaussure.
Pour arriver à une chaussure aussi légère, il y a bien évidemment eu une réflexion générale sur la conception de la paire pour vraiment optimiser le poids dans chaque élément. Quand on parle de vitesse, à un niveau de puissance et de force égale, réduire le poids c’est forcément un des éléments les plus rapide pour arriver à un gain de vitesse. Ensuite ce qu’on voulait arriver à faire, ce n’était pas une chaussure légère à tout prix, mais plutôt une chaussure légère qui reste une chaussure de foot et une chaussure de foot de haute performance. Pour ça, on prend en compte plusieurs choses et on en revient au terrain. On ne parle pas d’un sprint tout droit, le foot est un sport où les changements de direction sont nombreux et une répétition de petits sprints, pour ça on a besoin de maintien. Mais attention, si la vitesse a été le maitre-mot de la paire, il ne faut pas oublier que le football est aussi un sport de ballon, et l’intérêt de la tige MatryxEVO c’est qu’elle répond également aux besoins de toucher de balle avec une souplesse sur l’avant du pied qui permet d’avoir une interaction avec le pied très intéressante. On ne voulait pas faire une chaussure super légère mais très raide.
Les crampons sont l’outil quotidien des joueurs de foot. Or, on a pu voir de nombreux joueurs réticents à l’idée de porter les nouveautés de la marque (Phantom GT et adidas X Ghosted), ce qui n’a pas été le cas chez Puma avec la Ultra. A quel degré les joueurs et joueuses Puma sont impliqués dans le processus de création d’un modèle
D’une manière générale, notre approche c’est vraiment de collaborer avec nos joueurs. On essaie d’être le plus proche possible d’eux afin de répondre à leurs attentes parce que c’est leur travail et les crampons sont leur outil de travail. Ensuite quand on a créé la Ultra, on a regardé et on a écouté les consommateurs à tout niveau et on a vu que pour certains la chaussure de vitesse correspondait forcément à un chausson serré, étroit et des matériaux pas forcément souple. Apporter une réponse à cela a donc été un élément central de notre cahier des charges et encore une fois, la façon dont on a créé la Ultra, que ce soit via MatryxEVO mais aussi de manière générale quand on a créé la chaussure au niveau du fit, il était important d’avoir une dose de confort. Un match de foot, ça reste 90mn. C’est super si tu es rapide pendant la première demi-heure parce que tu sens bien mais si au bout de 30mn tes crampons te font mal, il reste encore une heure où tu ne seras peut-être plus le plus rapide. Ce sont tout ces éléments que l’on prend en compte. On a fait des phases de test avec les joueurs, notamment Antoine Griezmann qui a été dès le début très proche de la création de la Ultra. Avec la paire, on n’a pas besoin de ce temps d’adaptation ou même de la casser pour se sentir à l’aise comme on le faisait dans le passé.
Un nouveau coloris pour la Puma Ultra, plus que jamais associée à la vitesse
L’an dernier, à l’occasion du lancement de la Puma Future 5.1 à Barcelone, nous avons eu la chance de discuter avec Thierry Henry à propos de son implication avec la marque, a-t-il été impliqué pour la création de la Ultra ?
Effectivement, on pourrait presque dire que Thierry Henry est un consultant en développement et en design parce qu’on a des échanges réguliers et qu’il a une vraie sensibilité sur les produits. Même sur la Ultra, nous avons échangé avec lui et notamment sur la direction générale et les points importants. C’était, de loin, le joueur le plus rapide de sa génération et qui alliait ce qu’on recherchait avec la Ultra, la vitesse et le toucher de balle. Une des phrases qui nous a marqué, c’est “super les mecs, c’est exactement ce qu’il faut, mais n’oubliez surtout pas le toucher de balle parce que les vrais bons joueurs c’est ceux qui vont vite et vite avec le ballon, pas juste vite en courant”.
Avec les joueurs amateurs, on teste uniquement la version élite ou toute la gamme ?
D’une manière générale, on teste tous les niveaux de prix. Oui il y a le niveau élite qui est pour les joueurs ambitieux et les professionnels mais il y a énormément de pratiquants qui pour diverses raisons vont chercher d’autres produits. À tout les niveaux de gamme, on essaye d’apporter des réponses. Pourquoi parce que j’achète un produit à 80€ devrais-je faire un compromis ? On essaye d’apporter le meilleur rapport qualité-prix sur tous les modèles. Quand on est dans nos processus de création, on commence en même temps le développement de la paire élite et des autres gammes parce que c’est le coeur de gamme. D’un côté tu as l’image de marque mais de l’autre tu as la grande majorité des pratiquants et on veut offrir un vrai bon rapport qualité/prix à ces pratiquants. On a tous été joueur de foot, on a envie d’apporter le confort et le plus d’innovations pour offrir la meilleure expérience.
« Ce qui est clair c’est que la légèreté toute seule n’apporte pas la vitesse »
Lors de notre dernier échange, vous nous aviez expliqué que chez Puma, la Future et la One n’étaient pas pour tel ou tel poste mais correspondaient plutôt à des caractéristiques de jeu. Qu’en est-il aujourd’hui avec la Puma Ultra ? Les cartes ont-elles été redistribuées ?
C’est notre vision du foot et du foot moderne. Quand on regarde les profils des joueurs, ça a tellement évolué d’un point de vue physique et technique. On est plus comme dans le passé où on avait des grandes caisses derrière qui étaient peut-être un peu plus limité techniquement. Ce n’est plus le cas aujourd’hui. À l’heure actuelle, tous les joueurs ont besoin d’être techniques, ils ont tous besoin de se déplacer d’une certaine manière et rapidement. Oui, Ultra c’est plus dans l’idée de joueurs qui basent leur jeu sur la vitesse de déplacement avec le ballon et on retrouve forcément des attaquants et des ailiers. Mais on retrouve aussi des arrières latéraux ou des milieux box-to-box. Pour Future, c’est une chaussure basée sur l’agilité, pour les joueurs qui dribblent. Sur le fit aussi on a des différences. Ultra se dirige vers un pied normal à tendance un peu plus fin quand Future est pour un pied normal mais à tendance plus large. Là aussi, en fonction des morphologies, on a deux options différentes.
Quelques semaines après le lancement de la Ultra, vous avez déjà développé une paire de Ultra SL qui est la chaussure la plus légère du marché. Quelles sont les limites de la légèreté d’une paire de crampons ?
On ne connait pas les limites. On sait simplement que nous n’aurons pas de poids négatif, on arrivera jamais à -2grammes (rires). Les limites on ne les connait pas encore, c’était tout l’intérêt de la Ultra SL. On voit, on essaye de repousser les limites, on est arrivé à 90g sur une chaussure qui apporte un bon maintien, sur une chaussure qui est jouable. Après, c’est le développement des technologies qui nous aident à repousser ces limites. Où est-ce que cela va nous amener ? On ne sait pas, ce qui est sûr c’est qu’on cherchera toujours cette parfaite combinaison entre légèreté, maintien et retour d’énergie dont on a besoin. Ce qui est clair c’est que la légèreté toute seule n’apporte pas la vitesse.
Avec la légèreté, la vitesse est le maître mot pour qualifier la Ultra, mais vous le savez aussi bien que nous, ce n’est pas la chaussure qui fait le joueur. Alors qu’est ce qui rend une chaussure de foot rapide ?
On est d’accord sur le fait que ce soit le joueur qui fasse tout. Mais la façon dont un joueur se sent à l’aise, a forcément une importance sur sa performance, non seulement d’un point de vue physique mais aussi mental. Ensuite, si on regarde la notion de physique et notamment les joueurs pro, c’est du tuning que l’on fait à l’heure actuelle. Ils sont tellement pointus sur la préparation physique que notre objectif est d’être tout aussi pointu sur l’outil qu’on leur donne. Quand on parle d’une chaussures vitesse, il y a différents éléments qui rentre en compte. La légèreté est un élément clair comme on le disait, mais le maintien est aussi important afin de ne pas avoir une déperdition de force. Le troisième élément primordial est la semelle qui doit être légère et avoir l’accroche parfaite. Mais elle doit aussi apporter de la souplesse, du dynamisme et un retour en explosivité. Ce sont tous ces éléments et l’art de créer ce mélange parfait qui donnent une chaussure de vitesse.
Pour conclure, si on doit parler de l’avenir de la Ultra ?
C’est un avenir passionnant et super excitant. À l’heure actuelle, on est vraiment content de la Ultra, les retours que l’on a sont très bons. On est vraiment content et ça donne encore plus d’énergie pour avancer. Le fait de voir de plus en plus de Puma sur le terrain fait bien évidemment partie d’une stratégie mais c’est aussi en lien avec la qualité des produits.
Merci à Dominique Gathier et aux équipes de Puma pour cet entretien une nouvelle fois passionnant.
Aucun commentaire pour le moment